13.5.08

Nicole Hibert et Raymond Barre



Nini alias Bobosse arrivait de sa province et entrait à Sciences-Po.
Raymond Barre y enseignait régulièrement l’économie. «
C’était un homme brillant, un prof brillant, souvent passionnant d’ailleurs, mais en 1974, il prônait le libéralisme, c’était l’ultra-libéralisme (une théorie qui n’a rien de moderne, contrairement à ce qu’on pourrait croire). Giscard D’Estaing était au pouvoir, on était en plein choc pétrolier, le libéralisme on y était déjà. La France avait un problème comme d’autres pays européens, c’était l’inflation. Bref, ce cher M. Barre nous déclare avec sa voix inimitable et dans une espèce d’approbation générale : «mieux vaut 10% de chômeurs que l’inflation que nous connaissons actuellement, et en réalité, pour qu’une économie soit à peu près saine, on peut tabler sur 9 à 10% de chômeurs.» Voilà. Moi, mon sang de gauchiste et de socialiste convaincue élevée au biberon socialiste et jaurésien n’a fait qu’un tour. Je me suis dressée dans l’amphithéâtre et j’ai dit : «Monsieur le professeur, comment pouvez-vous dire une chose pareille ? Comment peut-on tolérer dans une société évoluée, dans un pays riche comme le nôtre, 10% de chômeurs ? 10% de gens sans travail ?» J’étais scandalisée. Il m’a regardée et il m’a dit : « qui êtes-vous, mademoiselle ?» «Je m’appelle Nicole Hibert.» «Mademoiselle Nicole Hibert, vous pouvez sortir, personne ne vous retient.» C’est comme ça qu’a commencé mon long parcours vers la sortie de Sciences-Po. »
Il faut savoir qu’à l’époque le taux de chômage était autour des 3%.
Ça n’a pas empêché Raymond Barre, une fois au pouvoir, de déclarer, la main sur le cœur, que le chômage était un fléau à combattre.

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